LA TRAVERSEE DES ALPES (1/2) - L'EFFORT...
LES ALPES
Du Vendredi 10 Octobre (Faverois- France) au Mercredi 29 Octobre (Opatija - Croatie)
La fameuse chaîne de montagnes est le premier obstacle topographique de taille que nous avons choisi de franchir afin de poursuivre ensuite notre périple le long de la mer Adriatique.
Jeunes cyclotouristes que nous sommes, nous n’avons jamais passé de cols ou même pédalé le long de routes sinueuses en lacets…Aussi nous en parlons avec un peu d’appréhension et de crainte depuis le jour où nous sommes partis de Quimper.
Après une bonne pause à Montbéliard dans la petite famille d’Elisabeth et Benoît nous avons deux options à l’esprit : ou bien descendre plein Sud pour franchir les Alpes au niveau du col du Simplon et nous retrouver alors dans la plaine milanaise, ou bien traverser les Alpes en diagonale du côté d’Innsbruck en Autriche pour ensuite parvenir au Nord de la Slovénie. Dans les deux cas, nous savons que plusieurs cols au-delà de 1500m d’altitude nous attendent en chemin, et qu’il nous faudra plus de ressources qu’à l’accoutumé pour pouvoir les franchir.
C’est notamment parce-qu’un cycliste croisé sur notre route entre Paris et Montbéliard nous a conseillé d’aller découvrir la vallée du Lesachtal dans le Sud-Est de l’Autriche que nous choisissons la seconde option.
Au moment d’écrire ces lignes, nous remercions le destin d’avoir placé sur notre route ce monsieur, au vu du bilan de ces belles pages de notre périple que constitue « Les Alpes ! »
MAIS DANS QUEL PAYS SOMMES-NOUS?
« Mais Vincent, nous sommes en Suisse ou en Allemagne là ? »
Cette question, nous nous la posons régulièrement durant les premiers jours passés à longer le Rhin et le lac de Constance. La frontière germano-suisse présente ici un découpage tant ciselé que même les locaux ne doivent plus trop savoir dans quel pays ils se trouvent.
Mais finalement de Basel (Bâle) à Konstanz, en passant par Rheinfelden ou Schaffhausen, nous nous en fichons un peu que les villes que nous visitons soient suisses ou allemandes puisqu’elles restent pour la plupart très agréables à découvrir. Trop proches de la Suisse, pays neutre et surtout banque du monde, les villes allemandes n’ont pas été bombardées par les Alliés durant la Seconde guerre mondiale. C’est donc un style assez ancien et préservé que nous découvrons là, rien à voir avec les villes traversées lors du voyage Paris-Berlin.
Les paysages sont verdoyants et les méandres du Rhin sont parfois encadrés de belles falaises, offrant de jolies perspectives. Durant les premières journées le long du Rhin, nous campons sur de belles pelouses bien grasses avant de commencer à redécouvrir les bienfaits de Warm-Shower les jours suivants.
Les jours qui suivent, même constat : nous ne savons plus trop où donner de la tête et sommes parfois perdus pour garder à l'esprit dans quel pays nous sommes : De la Suisse nous arrivons en Autriche puis en Italie puis re-Autriche puis re-Italie et enfin en Slovénie…Toutes ces frontières qui aujourd’hui n’en sont plus vraiment, ont de quoi nous faire perdre un peu la tête et mettre à mal nos préjugés. Explications :
Le 19 Octobre, couverts de la tête au pied (doudoune, bonnet, gants et collant), nous levons le camp de Gries am Brenner, bien résolus à passer le col de Brenner pour rallier l’Italie et délirons sur le fait que derrière ce passage d’altitude, ça parle italien, ça mange des pâtes, ça roule en Vespa et puis tant qu’à faire il fait chaud (pays méditerranéen oblige) ! Pas dupes non plus de nos stéréotypes, mais quand même un peu ignares, les frontières nous jouent encore un tour : une fois arrivés en haut du col, nous nous rendons vite compte que les ritals du coin parlent… allemand ! « Ja Ja ! » le Sud Tyrol, région d’Italie est germanophone. Ainsi, tous les panneaux de signalisation sont écrits à la fois en italien et en allemand. Cette région ressemble d’ailleurs beaucoup à la région d’Innsbruck que nous venons de quitter : architecture, habitudes des habitants et paysages sont très similaires.
De la vallée de Klostertal en Autriche à Tarvisio en Italie, en passant par les magnifiques vallées de Lesachtal ou de Chienes dans les Tyrol autrichiens et italiens, les paysages et les hommes ont finalement ce trait commun d’être montagnards. Les savoir-faire architecturaux, varient sensiblement à mesure de notre avancée mais restent liés au travail du bois des sapins qui couvrent des versants entiers de montagne. Les paysages, mêlant avec beaucoup d’harmonie prés verts dans lesquels broutent les vaches, et forêts, sont plus ou moins admirables d’une vallée à une autre mais restent façonnés par l’homme selon les mêmes traditions ancestrales. Les hommes et les vaches enfin, eux, parlent tous et toutes l’allemand !
Tout cela pour dire que malgré les frontières, les hommes, les langues, les paysages, les cultures et autres us et coutumes restent souvent similaires dans les Alpes. Alors que les frontières actuelles tendent, dans nos inconscients de bretons, à penser les Alpins de différents pays comme tous bien différents, ces derniers sont en fait rassemblés autour d’un même environnement et d’une histoire ancienne commune (empire austro hongrois).
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DES COLS ET DE LA DESCENTE A TIRE LARIGOT !
Le 15 Octobre, après une bonne pause chez Markus le designer, nous quittons Alstätten et la région du Lac de Konstanz, pour nous engager avec un peu d’appréhension vers notre première vallée alpine, la vallée de Klostertal dans la région autrichienne du Vorarlberg. « The road to hell is there guys » nous dira Markus, comme pour nous souhaiter bonne chance…
Nous passons rapidement de grandes étendues toutes plates qui entourent le lac à une vallée encadrée par de nombreux sommets. « Ça y est, on rentre dans les Alpes, Jack !…et on n’est pas près d’en sortir ! ».
C’est le début de longues ascensions suivies de longues descentes au cœur de vallées toutes plus jolies les unes que les autres.
ARLBERG PASS/Le 16 octobre, après une soirée un peu débridée à Klösterle chez notre accordéoniste préféré, alias Siegfried, nous pédalons en direction de l’Alrlberg Pass. Premier obstacle, la route est fermée, ou du moins pour les voitures. Nous partons alors à la pêche aux informations auprès des habitants et travailleurs du coin, pour savoir s’il est possible de franchir ce col à vélo ou s’il nous faut prendre le train qui passe sous la montagne. Est-ce un éboulement, la neige ou des travaux qui empêchent les voitures de passer, nous ne parvenons pas à le savoir, faute de vocabulaire en allemand. De toute façon il est 11h du matin et le prochain train est à 17h et nous n’avons pas le courage d’attendre 6h. Voilà comment, sans être certains de pouvoir passer, nous partons malgré tout à la conquête de notre premier col. Quelques étirements de dernière minute (on n’est jamais trop prudents…) et c’est parti !
L’ascension est assez longue et difficile sur des pentes dépassant les 10% par moments. Après une heure de grimpette sur une route à circulation alternée ; tantôt au calme, tantôt accompagnés d’une caravane de camions de chantier ; nous découvrons que la voie est en train d’être bitumée, interdisant l’accès aux voitures. Mais pas aux vélos héhéhé ! Nous pouvons passer donc, même si le bitume reste très …« frais » par endroits !
Les quelques ouvriers des travaux routiers nous saluent au passage. Il faut dire qu’à 7km/h, ils ont le temps de nous voir arriver. Les versants arides de la montagne sont parfois barrés de câbles de remontées mécaniques de la plus grosse station de ski de la région. Sous un ciel nuageux et bas, les paysages nous paraissent désertiques voire presque hostiles : énormément de cailloux et seulement quelques arbres et buissons chétifs.
Le silence ambiant achève le travail, ajoutant aux scènes qui défilent sous nos yeux, au rythme de la longue montée, une touche de mysticisme. Contemplatifs, nous faisons de nombreuses pauses photo ce qui permet par la même occasion de détendre les mollets et de ralentir le rythme cardiaque.
Finalement, après quelques 3 heures d’ascension, nous sommes agréablement surpris de parvenir, sans trop souffrir le martyr, au col, indiqué par un bâtiment bien laid avec l’écriteau : Arlberg Pass - 1800m.
Bizarrement, personne ne nous y attend pour nous remettre notre maillot à pois rouge…
« Ça y est, on l’a fait, notre premier col !! ». 1800m, ce n’est pas l’Alpe d’Huez mais pour la postérité et le souvenir nous posons tout de même, pas peu fiers, devant ce bâtiment au goût des plus recherchés (ou pas), comme devant un trophée de chasse (les cartouches en moins).
BRENNER PASS/ En ce très ensoleillé samedi 18 Octobre, nous partons tardivement d’Innsbruck (574m d’altitude), en compagnie de nos hôtes d’étape du jour : René et son chien Roméo. Ce dernier a carrément droit à sa place sur le vélo dans un porte-bagage dédié avec en prime une petite couverture en cas de frissons canins. Vous l’aurez compris, nous ne sommes pas partis que nous rigolons déjà beaucoup. Mais restons sérieux tout de même, l’objectif du jour est de taille …réduite : franchir le Brenner Pass qui est, avec ses 1372m, le plus bas passage des alpes ; mais cela avant la tombée de la nuit. Et ça, ce n’est pas une mince affaire !
Il s’agit là de la seconde ascension d’envergure de nos pérégrinations dans les Alpes. Dès la sortie d’Innsbruck, René nous fait emprunter des petites routes secondaires (anciennes voies romaines), certes très agréables, mais plutôt ardues, qui naviguent entre les remontées mécaniques de la station de ski d’Igls. Durant les 10 premiers km, nous grimpons déjà plus de 400m. Nous passons également à proximité de nombreuses infrastructures hivernales implantées là depuis 1964 et 1976 pour les Jeux Olympiques d’hiver.
A mi-parcours, après la pause caca de Roméo (le chien), René (l’humain) nous quitte pour rentrer chez lui. Etudiant, il doit finir ses devoirs ...
Il est alors 16h30 et nous sommes encore loin du passage italien. Nous enchainons alors de plus petites montées et descentes pendant deux heures jusqu’à ce que la nuit commence à montrer le bout de son nez.
Un peu frileux à l’idée d’avoir à galérer dans le noir dans les lacets du Brenner Pass sans savoir où planter la tente, nous nous résignons à rester du côté autrichien pour la nuit, à Gries am Brenner. Après plusieurs tentatives vaines de demande d’hébergement dans ce petit village, une dame très aimable vient finalement vers nous et, en plus de nous offrir des barres de céréales, nous propose de planter notre tente dans son jardin. La nuit s’avérera glaciale, mais à peu près en sécurité dans un jardin.
Nous ne faisons donc l’ascension du Brenner Pass que le 19 Octobre au matin, après un petit déjeuner agrémenté de gros gâteaux autrichiens que l’on nous offre très gentiment. Ici, les paysages sont plus verts mais souffrent de la proximité avec l’autoroute, la voie de chemin de fer et la nationale. C’est un vrai carrefour entre Europe du Nord et Italie.
Arrivés au col sans aucune peine, la frontière austro-italienne se joue donc de nous : pas de vespa, pas de jolies brunes, pas de petits restaurants de pâtes, pas même de pizza ! Pire, nous découvrons que ce qui se fait de plus laid en matière de centre commercial est tranquillement perché ici à 1400m d’altitude.
Nous quittons rapidement les lieux et poursuivons notre route direction Sterzing-Vipiteno ! La descente est superbe puisqu’au col débute un réseau de belles pistes cyclables, que nous ne quitterons que deux jours plus tard !
FREINE, JACK !!! / Comme après chaque col, l’ascension est suivie de longues descentes à la fois très rapides et interminables, faisant chauffer la gomme des freins et nous donnant quelques montées d’adrénaline. Après seulement quelques jours passés dans les Alpes, Vincent est d’ailleurs obligé de changer ses plaquettes de freins pour pouvoir continuer à rouler à peu près sereinement sans foncer à tombeau ouvert dans le premier ravin venu.
Ayant moins la tête dans le guidon durant ces descentes, nous en profitons pour admirer davantage le paysage et pour plus discuter, tout du moins lorsque la route est sèche et pas trop pentue !
Munis de notre petite Go Pro offerte par nos chers amis bretons, nous immortalisons souvent ces descentes, tels de vrais jackys tuning ! Cheveux au vent, nous nous croyons alors dans Crash Team Racing sur PlayStation et ça ça fait plaisir !
Mais nous restons très prudents malgré tout (ça c'est fait, Papa Maman ne vous inquiétez pas !)
Au moindre semblant de descente, l’énergie potentielle accumulée en montée se décharge en énergie cinétique et cela de façon d’autant plus forte que nous sommes chargés ! En quelques secondes, le compteur dépasse les 40 km/h, puis 50 km/h et là on commence forcément à se dire que ça vite quand même. Si les freins grincent, nous restons à 50 km/h (sauf dans les virages bien sûr) mais l’excitation poussée par l’adrénaline nous amène par moment à lâcher nos poignées pour nous rapprocher des 55 à 60 km/h, le vent dans les dents ! Fort heureusement ça ne dure pas longtemps, car il nous faut rester attentifs et vigilants, voitures, animaux et nids de poules sont à prévoir ! Mais jusque-là pas de casse, jusque quelques frissons et contractions musculaires par moment !
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DES AMBIANCES SOMPTUEUSES
« Tout il est propre, tout il est vert, tout il est agréable à la vue, tout il est gentil. »
La Suisse, l’Autriche et l’Allemagne tiennent définitivement bien leur réputation. La Slovénie n’a pas de réputation mais c’est un pays bien propre et sympathique finalement. Nous nous en rendons d’autant plus compte maintenant que nous avons pu nous balader en au Monténégro ou en Albanie par exemple… Les paysages, scènes et ambiances des vallées parcourues dans les Alpes resteront donc probablement parmi les plus beaux souvenirs de notre aventure.
LAC DE KONSTANZ/ Le 12 Octobre, le réveil a lieu au bord du Rhin pas loin de Schaffhausen, dans le jardin d’un habitant pépère qui n’a pas été trop surpris lorsque nous lui avons demandé d’installer la tente dans sa propriété à 22h du soir la veille. Le petit déj’ est plutôt sympa, assis sur une bûche, notre bol de café à la main, regardant passer sur le fleuve, les avirons et petits bateaux à vapeur.
Nous levons tranquillement le camp sous un ciel brumeux et reprenons l’Eurovéloroute des fleuves (n°6), que l’on retrouve ici après l’avoir déjà rencontrée le long de la Loire. L’itinéraire du jour est simple : longer le Rhin jusqu’au Lac de Konstanz. Ce jour-là, nous croisons de nombreux cyclo-touristes. Il semblerait même que c’est une petite affaire touristique dans le coin puisque nous apercevons parfois des hordes de cyclo-touristes tous juchés sur des vélos identiques. Il faut dire que nous pédalons plutôt benaise ici, sur des pistes cyclables parfaitement signalées qui longent le littoral, ce qui nous permet de visiter les jolies villes de la région et d’admirer les superbes paysages.
C’est dimanche et tout le monde est de sortie : il y a foule sur les pistes cyclables, sur les sentiers piétonniers, dans les vieux centres historiques et même sur le plan d’eau, en voiliers. Et le soleil se joint à la partie. Comme tout le monde, nous apprécions pas mal cette balade dominicale ! En plus des paysages bucoliques, les nombreux rapaces planant au-dessus de nos têtes nous poussent à nous arrêter souvent pour prendre le temps de tout observer.
Vers 14h, nous faisons notre pause pique-nique – pâtes sauce tomate – devant la boutique d’un verger. Table de pique-nique, panorama sur le lac, soleil dans la ganache, pommes ultra fraîches à un kopec, on est au top.
Pour finir la journée en beauté, après avoir longé le lac sur une trentaine de kilomètres, nous sommes hébergés ce soir-là à Konstanz chez un allemand membre du réseau Warm Shower. Il y a des jours comme ça, où nous nous disons, le sourire aux lèvres « on est quand même des petits veinards ». Alors nous tirons un défi hebdo pour narguer les copains et copines à la caméra (voir défi hebdo n°1). Bon, après il est vrai que nous passerons la journée du lendemain sous la pluie. On est en octobre, faut pas déconner, nous ne pouvons avoir une bonne étoile que par intermittence !
LESACHTAL VALLEY/ Après le repos du guerrier dans la petite famille de Petra et Peter à Ausservillgraten les 21, 22 et 23 Octobre, nous entamons l’ascension du col qui ferme la vallée autrichienne du Lesachtal côté Ouest, vallée dont on nous avait à plusieurs reprises vanté la beauté, comme si il s’agissait d’un « must do » type Mont-Blanc.
Il a neigé la veille, mais c’est à un soleil éclatant que nous avons droit pour la journée. On ne peut rêver mieux pour découvrir cette vallée. Le col derrière nous, nous pouvons alors admirer les sommets saupoudrés de neige fraîche. Devant nous : une petite route sinueuse peu fréquentée qui zigzague entre les petits villages traditionnels. Sur les côtés : des prés sublimés par les chutes de neige de la veille ! C’est effectivement splendide. Nous photographions et go-pro-tons à tout va. Ce jour-là, la pause déjeuner est quand même bien fraîche, les fesses posées dans un pré vert, nous regardons les vaches brouter en contrebas, et nous nous le répétons encore une fois : « on se gave bien ! ».
L’après- midi se poursuit dans cette jolie vallée. Tout est en harmonie ici : Aucune construction lourde, pas de grosses routes, pas de stations de ski, peu d’engins motorisés. Seuls des petits chalets tout en bois, quelques habitants, quelques vaches, des petits prés d’herbe fraichement coupée à la faux et des petits bois. Un régal pour tous les sens.
Avant d’atterrir dans la plaine, nous avons même le droit à une énorme descente en lacets qui nous défrise les tifs !
Une fois « en bas », les paysages sont tout de suite moins beaux et la transition est assez radicale. Dommage, nous aurions bien aimé que ça continue encore un peu… L’adrénaline et la joie redescendent, nous avons alors l’impression de devoir quitter les montagnes russes à couper le souffle du dernier parc d’attraction à la mode mais sans pouvoir racheter un jeton pour y retourner...
L’ascenseur émotionnel est d’autant plus fort que nous ne trouvons pas où être hébergés ce soir-là. Dépités par des ouvertures de portes suspicieuses à répétition, nous finissons par planter la tente dans un chemin à l’écart du village de Ratendorf. Conclusion de la journée : nous sommes bien contents d’avoir croisé et écouter cet apiculteur-cycliste, trois semaines plus tôt. Cette vallée du Lesachtal vaut le détour !
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GROS BREAKS ET SUPERBES RENCONTRES
Dans les Alpes, pour nous épargner trop d’engelures aux doigts et la sensation de sentir le chien mouillé, nous avons pu compter sur deux choses : le fameux réseau social pour cyclotouristes avertis Warm Shower et l’énorme hospitalité des habitants chez qui nous avons frappé à la porte.
PETITES ATTENTIONS SUISSES / Nous sommes le 13 Octobre, nous venons de quitter l’appartement de Martin (membre WS) chez qui nous avons passé la soirée au chaud à Konstanz à discuter de l’aventure de Christian (tour for life.org), autre membre de WS lui aussi hébergé chez Martin ce soir-là. Nous pédalons sous un crachin breton le long du lac, et tout de suite les paysages sont forcément moins photogéniques que la veille qui était une des journées les plus ensoleillées de nos trois semaines dans les Alpes. C’est ainsi donc que ce jour-là, « on pédale pour pédaler » en regardant tant bien que mal à travers nos verres de lunettes trempés. Au premier plan : nos mains, trempées elles aussi ; au second plan : une piste cyclable… vous l’avez deviné trempée également. Et au-delà ? Au troisième plan ? hé bien du brouillard, du brouillard, du brouillard et sans doute un lac mais nous ne le voyons pas, y’a du brouillard !
Mais bon ça fait aussi partie de l’aventure ce genre de journée moisie… Dans ces cas-là, puisqu’il n’y a pas grand-chose à admirer aux alentours, nous nous réfugions et nous perdons chacun de notre côté dans nos pensées et attendons le soir pour tenter de nous mettre à l’abri. Au chaud chez quelqu’un quand nous avons de la chance, sous la tente MSR avec ses traditionnels 100% d’humidité quand nous en avons moins…
Mais ce jour-là nous restons à la cool car nous avons anticipé depuis quelques jours déjà une nuitée à Alstätten, à 75km à l’Est de Konstanz, chez Markus – également membre du réseau WS. Manger du pain mouillé à midi et finir la journée complètement trempés n’a donc pas trop d’importance car ce soir, chez Markus c’est plancher chauffant sous les orteils et toit au-dessus de la tête !
En fin d’après-midi, les nuages, connus pour aimer la région, s’éparpillent et nous laissent entrevoir les sommets à travers quelques coins de ciel bleu. A cet instant précis, nous ne sommes pas très loin de St. Margrethen, où Simon est déjà passé lors d’un voyage en auto-stop il y a 5 ans.
Nous nous arrêtons une minute pour consulter la carte géographique quand une BMW se gare juste dernière nous. De cette dernière sort une quinquagénaire qui nous aborde pour discuter de notre voyage, ayant elle-même déjà entrepris de nombreux voyages à vélo. Elle parle très mal anglais mais parvient à nous demander si nous avons besoin de quelque chose et si nous avons un toit pour la nuit. Au fil de la discussion elle nous conseille alors une route à prendre pour aller au plus vite vers le plancher chauffant. Après l’avoir remerciée pour ses conseils, nous enfourchons de nouveau nos selles et suivons donc l’itinéraire qu’elle nous a conseillé. Au bout de 3min de vélo sur cette route nous apercevons cette même dame sortant devant nous de sa voiture nous faisant des signes de la main pour nous arrêter. « Mais, qu’est-ce qu’elle nous veut encore, elle va pas bien ou quoi ? » nous disons-nous un peu médisants. Nous ravalons très vite notre mauvaise langue au moment où elle enfourne 40€ dans la sacoche de guidon de Vincent avant de prendre la poudre d’escampette en voiture sans que nous n’ayons le temps de dire quoi que ce soit ! Hébétés, la scène nous fait finalement bien rire et nous nous disons que ça peut valoir le coup de galérer une journée sous la pluie ! Ils sont fous ces suisses !
Les Suisses sont des gens généreux se dit Simon en se rappelant qu’il y a 5 ans, ses partenaires d’auto-stop avaient également eu droit à de l’argent lors de leur passage dans ce pays !
Finalement, nous parvenons à trouver l’appart de Markus vers 19h. Nous découvrons alors avec joie que ce designer-infographiste vit dans un immense appartement ultra-moderne aux larges baies vitrées, lui servant également de bureau. Il nous propose de dormir dans son grand salon et d’utiliser la cuisine tandis qu’il part rejoindre sa compagne pour la soirée. Comme nous sommes français, il a demandé à sa fille, boulangère, de nous apporter du pain. Une petite attention suisse de plus pour la journée qui nous touche beaucoup. Comme il est désormais coutume de dire dans ses cas là : « On est calé ! ».
Nous nous sentons tellement bien qu’avec l’aval de notre hôte nous décidons de faire notre premier break depuis que nous avons quitté Paris en restant une journée et une nuit supplémentaire chez Markus. Cet homme est très calme, très posé et très intéressant. Cette pause s’avère l’une des plus reposantes et zens que nous ayons pu faire.
HOSPITALITE AUTRICHIENNE / Alors, en Autriche, ça commence très très très fort dès le premier jour, le 15 Octobre, au sein de la vallée du Klostertal. Partis de chez Markus, nous atteignons avant la nuit tombante, le village de Klösterle.
L’air sans doute fatigué et un peu inquiet pour la recherche d’un abri, nous nous faisons rapidement aborder par une gentille dame qui comprend rapidement ce que nous cherchons. Elle s’empresse alors d’appeler ces connaissances pour nous trouver quelque chose mais sans succès. Au terme quelques déambulations et discutions, nous nous trouvons en deux temps trois mouvements catapultés chez le proprio de cette dame ; proprio qui s’avère être un véritable personnage (que vous connaissez peut être déjà si vous êtes des fidèles de la galerie « NOS HÔTES ») le fameux Siegfried.
Ce gentil monsieur aux nombreuses passions (les trains qu’il conduisait, le bricolage, le « café à bulles », l'accordéon, la nostalgie des pompiers réservistes…) nous offre le gîte, le couvert et beaucoup de bière ; le tout accompagné de morceaux d’accordéon chromatiques. Très rapidement, ou plutôt à mesure que nous ingurgitons les grosses bières de 50 cL trônant devant nos assiettes, le repas prend des airs de fête improvisée dans sa petite salle à manger inchangée depuis 20 ans. Et nous devons dire que même si nous n’avons presque rien compris à ce qu’il a pu nous raconter en allemand, nous rigolons bien ce soir-là avec Siegfried, l’accordéoniste hors pair ! Malgré tout, nous sommes assez frais le lendemain matin et nous franchirons notre premier col dans la journée.
Notre second hôte autrichien est également un personnage à sa façon : René nous héberge une nuit dans son appartement étudiant qu’il partage avec sa copine, absente ce soir-là, et avec son chien, Roméo. Vrai fan de vélo, il a pour habitude d'accrocher le sien à au mur du salon...Le décor est lancé !
Ce soir-là, René nous parle beaucoup beaucoup de son précédent voyage à vélo jusqu'en Norvège. Très hospitalier, René nous offre le lendemain l’un des petits déjeuners les plus fournis que nous n’ayons jamais eu avant de partir à la conquête du Brenner Pass.
Lorsque nous leur disons au revoir à lui et son petit chien Roméo, nous pensons avec beaucoup de « philosophie », que ce voyage n’a pas fini de placer sur notre route de sacré personnage ! C’est ce qui le rend différent d’un voyage classique !
Si René est un fada de tous les gadjets derniers cris qu’il est possible de se procurer pour faire du cyclotourisme, les derniers autrichiens à nous avoir supportés ne jouent pas du tout dans le même registre…bienvenue dans la cour des grands !
Peter et Petra, forment un couple d’aventuriers et cyclistes éprouvés qui ont parcouru le monde à vélo pendant plusieurs années. Mais cette année ils font un break dans un joli village reculé de l’Est Tyrol, le temps que la nouvelle-née, Esmé, grandisse un peu et soit prête pour partir à l’aventure avec eux. Très hospitaliers, ces membres du réseau WS trouvent même une combine pour que nous rentrions dans leur appartement alors même qu’ils n’y sont pas.
En ce 20 octobre, nous passons une bonne partie de l’après-midi à visiter une ancienne ferme typiquement tyrolienne, puis ne parvenons que très tard au niveau d’Ausservillgraten, le petit village d’altitude où vivent Peter, Petra et leurs enfants Esme (8 mois) et Ben (5 ans),. Après cette longue journée de 73km entre Italie et Autriche, clôturée par une dernière et terrible ascension à deux chiffres, dans le froid et l’obscurité, nous atteignons finalement le village ! Et là, que dire si ce n’est un pur moment de bonheur que de trouver la clé de l’appartement scotchée sous une porte et d’ouvrir notre logis pour cette nuit ! Fatigués et pas certains de tomber sur un tel accueil avant un bail, nous décidons par la suite de rester deux jours dans ce refuge reculé et reposant, avec l’accord de la petite famille pour faire une bonne pause.
Les journées de pause sont faites d’heures entières passées devant la tablette pour mettre à jour le site internet, travailler le projet d’étude du vernaculaire, répondre aux différents mails des partenaires et bien entendu donner des nouvelles aux proches. Mine de rien, cela prend énormément de temps et deux jours ne sont pas du tout de trop pour réaliser une partie de ces « tâches à faire » que nous accumulons et trainons dernière nous.
Le troisième jour nous sommes bien reposés et décidés à reprendre la route mais en ouvrant les rideaux au petit matin nous découvrons, stupéfaits, les flocons de neige bien gras et en quantité qui se sont lentement accumulés sur la route pendant la nuit. Bien plus expérimenté, Peter nous conseille d’attendre un peu.
Ce n’est pas aujourd’hui que nous allons nous remettre à pédaler. Plutôt à l’aise avec Peter et Petra, qui de surcroît nous en apprennent beaucoup sur les voyages à vélo et nous poussent à nous questionner sur la vie en général, ayant adopté un mode de vie particulier et anticonsumériste, nous profitons vraiment bien de cette troisième journée au fond de cette vallée reculée des Alpes autrichiennes pour oublier le vélo ! L’après-midi, nous partons même en voiture avec Peter et le fiston Ben en vue de découvrir les vallées enneigées alentours. Ça nous change du vélo.
HOSPITALITE ITALIENNE / Le 19 Octobre, une fois le col du Brenner derrière nous, nous passons la journée en Italie à admirer les paysages des vallées de la région du Sud Tyrol en suivant continuellement des pistes cyclables. L’occasion pour nous de réaliser une fois encore qu’en France, on est quand même mauvais en termes de pistes cyclables. Même dans les Alpes italiennes les infrastructures pour cyclistes sont un niveau au dessus ! En fin de journée, remarquant que ces pistes cyclables se foutent quand même un peu de notre tête en nous faisant parfois faire le double de distance que si nous prenions la route, nous décidons d’accélérer un peu le schmilblick et de retourner sur la route en compagnie des moteurs. Cette dernière est très empruntée et Vincent se fait même klaxonner par un bus au moment de s’engager sur la chaussée.
Avant la tombée de la nuit, nous voilà de retour sur les pistes cyclables de façon à trouver plus facilement « a safe shelter for the night ». Nous frappons à la porte de la première ferme venue. Lumière allumée, jardin bien tenu idéal si nous devions éventuellement planter la tente, maison assez vaste qui pourrait contenir de nombreuses chambres ; bref un combo de critères presque trop beau pour être vrai. Mais tout porte à croire que nous sommes tombés sur la bonne pioche du premier coup (c’est suffisamment rare pour que nous le soulignons) ! Nous nous approchons pour sonner à la porte quand un énorme saint-bernard s’approche et nous aboie dessus sans discontinuer. Alertés par Lisa (le doux nom du Saint Bernard) les propriétaires finiront par ouvrir la porte et par comprendre ce que nous recherchons. D’une amabilité extrême, ils nous offrent alors un abri fermé en bois à l’extérieur de la maison, un accès aux toilettes, à de l’eau et, en bonus, du jus de pommes et des bières !
Le lendemain, les adieux seront très forts malgré la barrière de la langue avec Antonia, la femme de la ferme. Nous pouvons en effet lire la gentillesse de cette dame à travers ses yeux et ses traits du visage. Un vrai plaisir de découvrir qu’il est possible de comprendre les intentions des gens par l’expression du visage.
Le lendemain, soit le 20 Octobre, bien décidés à faire une analyse d’un bâtiment vernaculaire, on nous invite facilement à visiter une grosse ferme de plusieurs niveaux.
La fille Irmgard, puis la mère, Maria, nous font visiter la propriété et les pièces de la maison principale une par une et commentent la visite en anglais et en allemand respectivement, tandis que le mari utilise le langage des signes pour nous faire comprendre qu’il nous prend pour des fous lorsqu’il apprend que nous avons pour entreprise d’aller jusqu’en Chine à vélo. Cet après-midi-là, nous en apprenons beaucoup sur les modes de vie de la région et Simon s’améliore également un peu en allemand.
HOSPITALITE SLOVENE / Nos 4 jours en Slovénie nous permettent de découvrir des personnes toutes plus hospitalières les unes que les autres, même si parfois, il faut attendre que les gens prennent le temps d’avoir confiance en nous avant de nous offrir un refuge pour la nuit : Jeruej, Maja, Patricija, Andrei et Mateja.
Le premier soir, arrivés en Slovénie par un froid polaire, nous cherchons à minima un jardin sécurisé pour planter la tente. Nous avons alors les mains et le visage gelés dès que le soleil se couche alors qu’en journée nous étions presque en T-shirt dans les montées.
Notre première tentative ne mène à rien puisqu’on nous indique comme cela arrive souvent, la direction de l’hôtel le plus proche. A la seconde tentative, la personne qui nous ouvre sa porte, nous montre où aller frapper car elle ne parle ni anglais ni allemand et ne comprend pas notre demande. A la troisième maison donc, nous rencontrons Jeruej et toute sa famille qui sont en vacances et qui louent cette maison pour l’occasion.
Malgré cela, ils acceptent que nous nous installions dans le jardin à condition que nous soyons partis pour 7h du matin afin d’éviter que la propriétaire nous aperçoive le lendemain. Ce soir-là, nous pouvons nous réchauffer autour d’une belle omelette et de bons gâteaux avant de retourner nous coucher sous la tente dans le froid de la nuit.
A Skofja Loka, ville très ancienne du centre de la Slovénie, nous arpentons les rues par un froid polaire en ce lundi 27 Octobre. Bien déterminés à faire la visite de l’intérieur d’une des vieilles maisons en pierre bordant la rue principale, nous tentons à plusieurs reprises de nous glisser à l’intérieur de certaines d’entre elles. Malheureusement, aucune de celles présentées dans les guides récupérés à l’office du tourisme local n’est visitable. Vincent persiste et force la chance en parvenant à se faire ouvrir la porte d’une vieille maison adjacente à l’hôtel de ville. Il tombe sur la très aimable Patricija qui nous fait avec grand plaisir une visite guidée des lieux ! Une dame extrêmement hospitalière et ouverte ! Vers la fin de la visite de la maison sans que nous lui ayons demandé, elle nous propose de dormir dans son appartement !
Nous faisons d’une pierre deux coups : visite d’une bâtisse vernaculaire et hébergement dans cette même maison au cœur d’une ville présentant le patrimoine architectural le plus ancien et le plus riche de Slovénie !
Le lendemain, pour pousser un peu le bouchon vernaculaire, nous allons demander de visiter l’hôtel de ville situé juste à côté. Nous sommes encore une fois accueillis avec égard et gentillesse. En sortant de cette visite, nous tombons nez à nez sur Jeff, un américain (ou plutôt un Texan) d’une quarantaine d’année au CV de cyclotouriste plutôt fourni. Bien installé aux commandes de son Citroën picasso rouge, il vit désormais dans le coin et profite de la discussion pour nous vendre les mérites d’un de ses pays préférés : « Albaaaania is fucking amazing man ! ». Que de rencontres improvisées !
Pour le découvrir, tapez juste "Jeff's Bike Tour" dans Google...
BESOIN D'UNE PAUSE ?
Tout courageux que vous êtes pour être parvenu(e) à tout lire jusqu'ici, vous avez mérité une pause et pouvez aller faire un tour sur la galerie de photos des Alpes ICI!!
Mais attention, ce n'est pas fini, nos histoires alpines continuent !! C'est par là !